Instant T

Nous sommes vendredi 4 décembre, il est presque 13 heures et nous sommes en territoire indonésien depuis mardi. Un autre rythme, une autre température, un autre fonctionnement. 

Les doudounes sont rangées avec les baskets, chaussettes et autres objets contre le froid. Les sacs sont donc à bloc. Nous, en sandales. C’est bon ça… Surtout en décembre. 

A cet instant T, nous avançons en ferry vers l’île de Lombok, toujours en Indonésie. Le ferry, c’est l’autre solution pour y aller. La première, la fastoche, on n’en a pas voulu. C’est le fast-boat. Trop rapide ?mouais… On mentirait en disant ça. Mais trop cher, ça c’est la première raison. Ensuite, trop m’as-tu-vu, trop touristique et trop loin de la population locale. 

Donc nous mettrons au lieu d’une heure, presque cinq. Qu’importe. Faisons le voyage pour le voyage, pas pour la destination. 

Les enfants sont avec Julien, à l’intérieur, ils poursuivent la trilogie Star Wars, casques sur les oreilles, face à l’ordinateur. Moi, puriste, je préfère l’épisode IV. Alors je reste sur le pont, avec tous les bagages et de l’air, même s’il est à 28. Toujours moins étouffant qu’à l’intérieur où on ne trouve pas de siège. Non, ici on enlève ses chaussures et on s’installe par terre. 

Je suis la seule femme sur le pont. La seule blanche avec mes filles à bord. Mais c’est ce qu’on aime, nous. Être dans la vie locale. La seule femme indonésienne à bord est assise sagement à l’intérieur, voilée. Ben oui, on oublie souvent que l’Indonesie est  le plus vaste pays musulman. Moi, je suis en short. Quel décalage… Et pourtant, pas d’animosité, pas de malaise. Bali est la partie la plus hindouiste de ce pays. Mais dès qu’on en sort,  on est confronté à l’écart de mode de vie des touristes et des musulmanes. Les femmes portent le voile même sous leur casque de moto. Il y a une salle  de prière à bord du ferry. 

Retour à l’instant T. On est plutôt fiers avec Julien d’avoir réussi ce transfert. Les gens nous ont proposé/scandé/balancé dès notre sortie du taxi des tas de possibilités, d’arnaques en tout genre aussi, pour rejoindre notre bateau et notre hôtel avec le meilleur prix et le meilleur moyen qu’on puisse proposer dans le coin. Mettez par dessus tout ça, la chaleur et les sacs de plus en plus lourds et des vendeurs de chips qui nous harcèlent. Un sentiment de pas être forcément à notre place : les seuls touristes à 3 km à la ronde, c’est nous ! Et bien on a survécu. Sans trop se faire arnaquer. Et on a de quoi manger. Enfin, de quoi tenir jusqu’à ce soir. 

La mer est d’huile. La luminosité importante fait plisser les yeux et les nuages font des volutes blanches au loin. Il flotte dans l’air une délicieuse odeur de cigarettes au clou de girofle qu’on ne trouve qu’ici et qui est la carte d’identité de Bali. Un indonésien essaie de savoir combien nous avons payé ce transfert, sans anglais pour lui, sans indonésien pour moi. Pas fastoche mais les chiffres restent les choses les plus faciles à exprimer. Il a bien compris que nous avions déjà un chauffeur, mais il propose un chauffeur pour le lendemain. Pour le transfert suivant. Nous représentons un moyen de gagner de l’argent facilement, je ne peux pas lui en vouloir mais je décline. A la place, il me propose un biscuit de son paquet. C’est gentil. 

Je suis assise à taper sur mon iPad, et je transpire. Les vagues se sont réveillées et j’espère que personne n’aura mal au cœur. A Bali, nous étions en terre conquise, en Australie c’était le confort absolu du package maison et voiture, en NZ le camping-car était notre refuge. Là, on a cette sensation que l’aventure reprend. la chaleur y est peut-être pour quelque chose. Avec l’absence de confort. C’est ce qu’on recherchait, après tout. Et puis Lombok a eu un tourisme plus tardif que Bali. Alors on va voir. On est prêts. 

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